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mercredi 7 juin 2017

Retour chez le tsar


Edouard m'ayant invitée à la présentation d'un psautier imprimé sous Ivan le Terrible, le 25 ° exemplaire d'une série dont on n'en connaissait que 24, acquis aux enchères et offert au musée, je suis retournée à Alexandrov, en taxi, avec un ancien taulard, qui m'a parlé de sa vie en prison, dont il avait pris l'habitude, de ses filles pieuses et de la destruction des industries et de l'agriculture locale, du chômage. L'ex taulard croyait en la nature sacrée du monde, mais renâclait à aller à l'église. Cependant, l'une de ses filles ayant rêvé qu'elle ne vivrait encore que deux ans, et ayant un enfant en bas âge, il se demandait si ce n'était pas là le signe qu'il faudrait peut-être penser à prendre tout cela plus sérieusement.
Il faisait beau, ce qui changeait l'atmosphère de la Sloboda. A la cérémonie, dans la salle où jadis le tsar recevait les ambassadeurs, tout le monde se congratulait. Un choeur venu de Vladimir a fort bien chanté des chants religieux, qui auraient été cependant mieux à leur place à Tsaritsyno, chez Catherine II, qu'à la Sloboda, chez Ivan le Terrible. Il ne composait pas du tout dans ce style, c'était un "vieux-croyant" convaincu, puisqu'il avait convoqué, pour mettre les points sur les i, le concile des Cent Chapitres, sur lequel Alexis Mikhaïlovitch Romanov et son patriarche Nikon se sont assis sans se gêner et sans concile.
J'en ai profité pour photographier le magnifique linteau sculpté par les Italiens et qui donne dans la chapelle privée. Edouard m'a dit que cette salle voûtée des ambassadeurs avait été construite au siècle suivant. Les dalles sont d'origine, je marchais là où déambulaient le tsar et ses opritchniks, mais tout le reste était en bois, probablement polychrome, avec des sculptures, des piliers en forme de pommes de pin et d'ornements de Noël, peut-être des animaux fantastiques, mais plus probablement des figures religieuses.
Edouard m'a donné ensuite un billet gratuit pour toutes les expositions. L'isba paysanne, la boutique de marchand, le salon bourgeois, tout cela avec des collections locales. Les caves sous le palais des femmes, où une sono raconte la mort du tsar, caves d'origine également, celles où l'on torturait les gens, en principe. Mais non, en fait, on n'en est pas sûr. C'était peut-être plus grand, car ainsi que je l'ai remarqué, il y a la place pour les torturer, mais on les mettait où, quand on les arrêtait? Bonne question, très importante pour moi, car j'ai cela dans mon livre. Peut-être que cela ne se passait même pas là. Peut-être dans un bâtiment disparu depuis. Car il ne reste rien de toutes les maisons et les passages de bois qui occupaient ce qui est à présent un jardin. Je me base sur les dessins de Bilibine pour imaginer tout cela, mais Edouard pense que cela devait être plus sobre, que Bilibine en rajoute dans la déco.
La gardienne de l'isba paysanne m'a fait remarquer qu'on n'y vivait pas si mal, en famille, et qu'on s'entraidait pour les travaux de la vie quotidienne. Je disais au taxi taulard que le chômage n'existait pas, dans les temps anciens, parce que travailler, c'était cultiver son lopin pour en tirer sa subsistance, élever des animaux, filer la laine et le lin, tisser, confectionner, bâtir et fabriquer tout ce dont on avait besoin. Mais maintenant, plus d'agriculture, même vivrière, dans le pays, parce que Medvedev a déclaré que ce n'était pas rentable. Ah la rentabilité... Voilà un mot qui devrait être interdit. Nous ne nous en sortirons pas tant que nous raisonnerons en ces termes, et les gens continueront à courir s'entasser dans des villes monstrueuses pour y mener une vie de merde et échouer sur le trottoir en tant qu'SDF ou prostitués.

On voit ici le magnifique linteau et la copie du trône d'ivoire 
Eglise de la Protection de la Mère de Dieu



coupons d'imprimés traditionnels du XIX° siècle

Quenouilles décorées

Samovars

Les emballages des bonbons russes avaient le même pliage spécifique
qu'aujourd'hui...

Le poële russe

La table avec le "beau coin" des icônes. Une étagère faisait tout le tour de la pièce
on y mettait la vaisselle

L'atelier des hommes

Couronnes de lin

La chapelle du tsar.


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